Rendez-vous à la préfecture du Rhône : une affaire de corruption ?
Un rendez-vous à la préfecture du Rhône : voilà quelque chose qui est devenu un enjeux fondamental pour tout étranger résidant dans le département. A la file d’attente pendante des heures dans le froid et debout, le système des rendez-vous par internet commencé en 2015 était censé apporter une solution permettant que les usagers du service public (la qualité d’étranger n’en fait pas des sous-usagers comme on aurait tendance à le croire quand on voit le traitement qu’il leur est infligé en général).
Cette solution s’est avérée complètement fausse. Très vite les délais ont atteints des recours avec plus de neuf mois d’attente pour un rendez-vous à la préfecture du Rhône jusqu’à la crise sanitaire qui a entraîné une refonte globale du système des rendez-vous par internet sans garantir un meilleur fonctionnement. Mais au-delà de la simple critique d’une solution administrative qui n’a pas été réellement réfléchie en amont, c’est un autre sujet qui aujourd’hui fait parler de lui.
Dans un article du 10/12/2020, publié sur le site d’information rue89Lyon, on découvre qu’une fonctionnaire de la Préfecture du Rhône vendait ses services pour faire passer certains étrangers issus d’une communauté devant les autres. A ce stade, toutes les personnes impliquées continuent de bénéficier de la présomption d’innocence, nous parlerons donc au conditionnel.
L’affaire est la suivante : une fonctionnaire du nom de L. aurait vendu des rendez-vous en avance à certains étrangers pour des sommes allant de 800 à 1000 euros. Deux autres personnes auraient servi d’intermédiaire de la manière suivante : l’une A. depuis sa boutique située à Guillotière et l’autre H. qui travaillait dans un cybercafé et « rabattait » vers A. les clients potentiels. A. aurait alors pris contact avec L. pour convenir des jours et des rendez-vous qu’il était possible de faire. En utilisant la file pour les renseignements, ils auraient fait passer les personnes étrangères qui avaient accepté de payer L. pour ses services.
La Préfecture du Rhône aurait informé le procureur de la République suite à un signalement du mois d’août 2019. L’enquête a été confiée à la Police Judiciaire et au mois de juin 2020, l’ensemble du réseau a été arrêté, placé en garde-à-vue et présenté à un juge d’instruction.
Cette affaire de rendez-vous à la préfecture du Rhône interroge forcément quand on connaît les enjeux et les difficultés que rencontrent les autres étrangers :
-
Comment un simple rendez-vous peut-il devenir si important qu’il justifierait des infractions pénales de cette nature ?
-
Comment un simple fonctionnaire de la Préfecture du Rhône peut avoir la possibilité de faire passer un usager sans qu’il y ait une traçabilité rendez-vous => dossier déposé ?
-
Comment pendant plus de trois années (de 2016 à 2019) les fait auraient pu se dérouler à l’insu de tous et ce malgré le signalement de la PAF ?
Il existe bien des réponses à donner ses questions, mais ce n’est pas mon propos et cela prendrait bien plus d’espace et de temps qu’un simple article.
Par contre cette affaire rendez-vous à la préfecture du Rhône devrait amener l’administration à prendre des mesures pour que cette situation intenable évolue sur le long terme. Et au-delà il faut espérer que le pouvoir politique fasse pression sur l’administration pour qu’elle mène à bien une telle réforme.
Peut-on être optimiste ? L’auteur de ses lignes ne le sera malheureusement pas trop. Le rapport de l’inspection générale de administration aboutira à des recommandations qui ne seront probablement suivies que partiellement et pendant peu de temps avant un retour au status quo. La Préfecture du Rhône se défaussera complètement sur la fonctionnaire en cause, en estimant qu’il s’agit du fait d’une personne isolée et non d’un système.
Pourtant au-delà de ce triste fait divers qui va faire peser un (légitime) vent de suspicion sur le service de la Direction des Migrations et de l’Intégration (DMI) de la Préfecture du Rhône, une vrai réflexion pourrait avoir lieu afin de créer enfin un vrai service public moderne et capable au long terme de résister à des pressions massives et surtout d’offrir aux étrangers un accès digne à un service public auquel ils ont complètement le droit.
Article précédent : Où déposer sa demande de titre de séjour ou de visa de long séjour - Article suivant : Les travailleurs saisonniers étrangers en France