Le sans-faute des étudiants ou l’application dévoyée de l’article L. 313-7 du CESEDA
Un peu comme les saisons qui se succèdent, il arrive un moment dans l’année, où les préfectures décident de s’attaquer au volumineux dossier des étudiants étrangers. Car il est vrai que les titres de séjour mention « étudiant » arrivent en seconde position pour l’année 2014 comme motifs d’admission au séjour (65 199 / 209 782 nouveaux titres de séjour).
Les critères prévus par l’article L. 313-7 du CESEDA sont simples : des moyens de subsistance d’une part et une inscription dans un établissement de formation universitaire d’autre part. La majorité du temps, ces deux critères sont réunis et l’étudiant est donc admis à séjourner en France avec un visa de long séjour valant titre de séjour pendant sa première année d’étude.
Mais quand vient le mois de mars, et que l’année universitaire est bien entamée, voire touche à sa fin, l’administration vérifie que l’étudiant remplit toujours les conditions de son titre. Or si le montant nécessaire pour que le critère des moyens de subsistance soit rempli pose généralement peu de problème, la condition de progression dans les études ou d’assiduité cristallise tout le contentieux.
Le gouvernement a prévu une circulaire en 2008 qui était censée guider les préfectures. Mais force est de constater que, bien souvent, les parties les plus favorables aux étudiants sont écartées de l’appréciation qui est faite. Plusieurs cas traités par mon cabinet ont été de parfaits exemples d’une vision peu encline à favoriser le parcours général, mais prompte à sanctionner le moindre écart.
Dans un dossier qui a été jugé en référé par le Tribunal administratif de Lyon, la cliente avait un parcours universitaire sans le moindre accroc. Elle avait validé les trois années de son cursus d’ingénieur mais n’avait pas pu obtenir le diplôme en raison d’une certification défaillante en anglais. Elle était, au moment où la décision de refus de titre et d’OQT a été prise, entrain de passer l’examen.
La préfecture du Rhône, qui avait refusé à l’intéressée une autorisation provisoire de séjour (dite APS Jeune Diplômé) pour le défaut d’obtention du diplôme, a donc décidé de lui refuser le renouvellement de son titre de séjour et de l’obliger à quitter le territoire. La préfecture a considéré, que comme elle avait terminé ses études, sa présence en France n’était plus nécessaire et qu’elle devait donc quitter le pays. Elle a même été jusqu’à ajouter que la cliente pouvait passer son examen d’anglais dans son pays d’origine bien que l’organisme de certification n’y soit pas présent.
Dans cette situation, caractéristique d’une volonté délibérée il faut le dire, nous avons saisi le Tribunal administratif en urgence afin de faire suspendre la décision de la préfecture du Rhône mais également de la contraindre à délivrer à la cliente une autorisation provisoire de séjour afin qu’elle puisse rester et obtenir son diplôme.
Lors de l’audience, et sans grande surprise, le représentant de la préfecture a estimé que la cliente dont le parcours universitaire brillant n’aurait pas été suffisant pour justifier d’un droit au séjour, devait retourner dans son pays d’origine et attendre afin de revenir passer les tests en France.
En toute logique, le magistrat n’a pas retenu une telle analyse et a fait droit à la demande de la cliente. Il a considéré que l’obtention du diplôme, pour lequel la cliente était venue en France, constituait un élément indispensable de son droit au séjour et qui justifiait dès lors la suspension de la décision afin qu’elle puisse obtenir sa certification en anglais.
Cette décision, que l’on doit saluer, illustre la réalité de la qualité d’étudiant étranger : à la moindre errance dans le parcours, la préfecture sévit… Bien heureusement, les Tribunaux savent se montrer plus mesurés dans leurs analyses des cas !
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