Nationalité par décret de l’autorité publique : quelle est la situation en France ?
Un article d’actualité sur la situation des demandes de naturalisation en France. Si à Lyon, le problème est récurent et prend aujourd’hui une ampleur toujours plus démesurée (entre quatre et cinq ans pour obtenir la nationalité par décret de l’autorité publique), la Rapporteur des droits a publié un rapport en mars 2022 qui rassemble les dysfonctionnements et atteintes au service public qu’elle a constaté partout en France.
Il est rappelé dès l’introduction des informations bien connues mais souvent peu diffusées : si le droit d’un étranger d’acquérir la nationalité française par décret de l’autorité publique n’est jamais acquis, le droit des usagers du service publics doivent être respecté que cet usager soit français ou non.
Le rapport fixe de nombreuses recommandations à mettre en œuvre par le Ministère de l’Intérieur. Si toutes les recommandations sont intéressantes, l’absence d’un pouvoir coercitif qui les accompagnent afin d’obliger l’administration à assurer une certaine forme de suivi aura probablement raison de ceux-ci. Pour le dire autrement, l’administration n’en tirera aucune conséquence et le problème va continuer.
Toute la première partie du rapport est consacré au droit de déposer et de faire enregistrer sa demande de nationalité par décret de l’autorité publique. C’est dire l’ampleur du problème qui pourtant consiste seulement dans le dépôt d’un dossier ce qui en pratique ne prend même pas une dizaine de minutes. La Préfecture du Rhône peut tout à fait servir d’exemple à ce titre avec les attentes de plusieurs années qu’elle inflige aux usagers du service public qui dépendent d’elle. Cette attente est évidemment un déni d’accès au service public, il n’est pas acceptable d’attente plusieurs années pour un simple dépôt de dossier. Certaine préfecture permette l’envoie du dossier par papier ce qui simplifie grandement les choses.
Ce problème d’accès au service public de la nationalité par décret de l’autorité publique est illégal comme le note le rapport :
« Le droit d’accès au service public implique pour l’administration de mettre en place des conditions adaptées afin que les postulants à la naturalisation puissent accéder de façon effective au guichet de la naturalisation, qu’il soit physique ou numérique. L’administration a une obligation de résultat vis-à-vis de l’usager qui entend déposer une demande de naturalisation. Elle doit fixer un rendez-vous, recevoir l’usager et examiner la complétude du dossier afin d’enregistrer la demande. »
La défenseur des droits précise qu’il s’agit d’une obligation de résultat cela signifie que l’administration doit délivrer ce rendez-vous et non pas seulement tout mettre en œuvre pour que l’usager puisse déposer son dossier ce qui est serait alors une obligation de moyen.
Le rapport indique notamment que le juge administratif est garant du droit à l’accès au service public de la naturalisation et plusieurs ordonnances et jugement rendus en 2021 ont commencé à aller en ce sens. Mais il est clair que ces quelques affaires ne sauraient suffire d’une part à combler les énormes illégalités commises par l’administration et d’autre part n’établissent certainement pas une ligne jurisprudentielle qui serait susceptible d’infléchir les pratiques malhonnêtes qui depuis longtemps sont tolérées.
C’est la raison pour laquelle nous recommandons aujourd’hui systématiquement à un étranger qui souhaite obtenir la nationalité par décret de l’autorité publique d’engager dés le départ une procédure judiciaire devant le Tribunal administratif de Lyon. Cela est possible dans tous les départements sont concernés par la plateforme interdépartementale du Rhône (Rhône, Ain, Loire).
La réaction de l’administration est fébrile et elle sent que ce type de comportement profondément illégal ne sera plus toléré encore longtemps. Mais pour qu’elles changent ses pratiques, il est indispensable d’avoir recours à l’outil judiciaire au plus tôt afin d’éviter des années d’attente.
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